Comment ça coule ; Mycorhizes, sols et transferts du cesium 137

 

Les analyses de césium radioactifs réalisées sur la même station à différentes périodes en 2015 (tableau 1) montrent que la concentration  dans les carpophores peut varier considérablement durant la même saison, parfois plus que les variations interannuelles (à noter que les concentrations en potassium 40 et donc probablement en potassium stable restent à peu près constantes).

L'explication suivante pourrait être avancée : le césium est essentiellent présent dans l'environnement sous la forme chimique Cs+Cl- et est en solution dans l'eau du sol par temps humide. Les mycorhizes (l'interface entre la racine et les filaments du champignon) absorbent cette eau interstitielle et concentrent certains éléments minéraux.

La figure 1 présente l'aspect de mycorhizes avec de nombreux filaments mycéliens au sein desquels cette opération se déroule.

Le tableau 2 présente des résultats d'analyses sur les compartiments impliqués : sol, eau présente dans le sol ("eau interstitielle"), apex mycorhizés, autres parties des racines, activité en Bq/kg sur le champignon sec et activité en Bq/l sur l'eau présente dans le champignon. On constate que l'activité du césium est beaucoup plus élevée dans l'eau du champignon que dans l'eau du sol.

Troisconclusions peuvent être tentées en attendant des analyses supplémentaires :

1. Ces observations expliquent pourquoi les champignons mycorhiziens sont beaucoup plus contaminés que les saprophytes ;

2. L'expression des résultats d'analyses par rapport à l'eau du champignon permettrait de rendre compte au mieux du potentiel de concentration d'une espèce donnée ;

3. Les phénomènes de concentration sont suffisamment importants pour expliquer des phénomènes de remise en surface du césium radioactif via le transfert des mycelia vers les carpophores, qui se décomposent en surface ; celà limite donc la migration en profondeur de cet élément et probablement d'autres minéraux.

 

Tableau 1 : résultats d'analyses sur les mêmes espèces de la même station à des dates différentes de la même année.

 

 

Figure 1 : Apparence des mycorhizes telles qu'on peut les prélever dans le sol ; à gauche, grappe d'extrémités mycorhizées telles que visibles à la loupe ; au centre et à droite, détail d'apex mycorhizés où l'on voit distinctement les filaments fongiques.

 

Sol, activité exprimée sur le poids sec Eau interstitielle Apex mycorhizés Racines Champignon, activité exprimée sur le poids sec Activité exprimée sur l'eau du champignon
           
69 ± 6 < 0,3 41 ± 7 14,7 ± 4,6 1200 ± 140 133 ± 15
58 ± 5,4 1,45 ± 0,16 117 ± 31 71 ± 15 4410 ± 420 331 ± 30
8 ±  2 < 0,7        

Tableau 2 : résultats d'analyses sur les compartiments de l'environnement impliqués dans le transfert de césium vers les carpophores. Les résultats sont exprimés en becquerel par kilogramme sur la masse sèche pour les échantillons solides et en becquerel par litre pour l'eau.